Maman? Je peux avoir mon compte Facebook?

Antoine,7 ans. 
Mon fils. 
Le mien. 
Celui que j’ai porté, allaité et pour lequel je remplis la mission de “maman” avec son lot de refus et de répétitions: “tiens toi droit”, “calme toi”...

Mon fils, donc, m’a posé cette question à moi, sa mère, qui exerce aussi le merveilleux métier d’enseignante en communication sur les médias sociaux spécialisée en techniques de mercatique en ligne et tout particulièrement sur FACEBOOK.

La question résonne encore: "Maman? Je peux avoir mon compte Facebook?".

Il me l'a demandé à Moi. Moi qui revendique depuis quelques années. Moi qui prévient. Qui mets en alerte. Qui renseigne les étudiants sur les traces qu’ils déposent sur Facebook.

Moi qui préconise:

"Bouclez vos accès. Prudence avec les commentaires, les statuts, la diffusion de votre image, votre personal branding, votre réputation numérique..".

Mais, Pourquoi? Pourquoi Antoine n’as tu pas demandé à ton père? Ton père est conducteur de travaux et le choc eut été moins grand pour lui. 

D’ailleurs, ton père m’a dit: “pourquoi pas?”
J'ai alors répondu: 

Si c'est notre grand garçon, il n'a pourtant que 7 ans.

Puis, l’âge “légal” est de 13 ans. 

Ton père à répliqué:

"Oui, mais la voisine qui est en CE2 est déjà sur Facebook. 

Nous devons donc y réfléchir".

J’utilise Facebook pour mes cours à l’Université...

Cette situation est particulière car notons que j’utilise facebook dans le cadre de mes cours à l’Université et ce, dans le cadre de la transmission du savoir sur les nouveaux médias.

Je sais donc à quel point ce nouveau média est ingrat, difficile, dangereux. Je sais donc à quel point il peut créer une addiction. J’observe la population s’y exprimer, échanger, se raconter. J’ai lu des dizaines d’articles sur cette merveilleuse génération à laquelle je suis profondément attachée. J'ai lu des dizaines d'articles sur les usages de Facebook chez les jeunes. Je sais à quel point Facebook est un bel outil de marketing.

Depuis, quelques années, j’ai bien remarqué que la population qui me demandait comme “amie” était de plus en plus jeune. 

La raison de cette demande: “Vous donnez des cours sur Facebook. Je veux faire du web plus tard. Pouvez vous m’accepter à votre cours avant que je n’entre à l’IUT?”. 

Comment voulez vous que je refuse un jeune qui demande à suivre un cours ou à lire des articles que je diffuse ou que j’écris. Comment voulez vous que je refuse des jeunes à qui j’ai recommandé d’ écouter France Culture et qui écoutent chaque semaine France Culture. L'objectif de cette écoute: se concentrer sur l’émission ""Place de la toile afin de pouvoir échanger ensuite sur le contenu de cette émission dans le cadre du cours, sur Facebook ou sur Twitter?
Je les accepte donc dans mon réseau Facebook et ils commentent (ou pas) les liens et les outils de réflexion et d'analyse que je leur propose.
Mais, depuis ces 4 dernières années, j'ai senti un changement. Ils sont de plus en plus jeunes.

Il y a deux ans, ils étaient âgés de 16 à 18 ans. Puis, l’année passée j’ai répondu à des demandes de jeunes âgés de 13 à 15 ans. 

Pourquoi n’acceptes tu pas d’être amie avec ma fille de 10 ans sur Facebook?

Au fil du temps, j’avais dans mon réseau un public de plus en plus jeune. J'adaptais donc, mon ton, mes expressions. Je devenais de plus en plus prudente sur la diffusion des images, des vidéos, des pubs que je proposais au débat. Puis cette année, un fait très nouveau s’est produit. J’ai du répondre à des demandes de mes petits voisins, cousins, fils de copains, qui savent que je suis “prof sur facebook”. Du coup, discussion obligatoire avec les parents. “Mais, tu ne peux pas refuser ma fille à tes cours? Elle apprendra des trucs”. 
J'insistais alors sur le fait que les informations que je diffuse sur mon mur ne sont que la prolongation du cours de niveau Bac à Bac +5. Puis, j'ajoutais que mon réseau est composé pour l'essentiel (encore) de personnes majeures. Je précisais aussi: " Ta fille n’a pas l’âge “légal”. Mais, les parents sont les parents. Ils décident.
Me voici alors devenue la spécialiste de la sécurisation des comptes d’enfant?

Mais, j'insiste: Je suis CONTRE.
Je suis CONTRE l’utilisation de Facebook par des enfants. 
Je suis également CONTRE le téléphone portable au collège (mais c'est un autre débat).

Pourquoi mon fils veut-il avoir un compte Facebook?

Aujourd’hui, voici que mon fils  qui est en CP (Vous lisez bien "CP") me demande si il peut avoir un compte Facebook. Pourquoi? Pour échanger avec ses copains et certainement un peu avec notre petite voisine qui est en CE2. (Imaginez en CE2). Il veut peut-être aussi être sur Facebook pour faire comme Mamie (qui joue sur Facebook) et comme maman (qui bosse sur Facebook).
Je viens de franchir un pas dans une dimension de la communication sociale que je n’imaginais pas exister. 
Mon fils sera t-il sur Facebook? Quel sera son pseudo? A quel âge, vais je lui autoriser à être présent sur Facebook? Serais-je dans ses contacts? Si je suis dans ses contacts, m’autoriserais je à lire ses statuts ou résisterais je à l’envie de les lire? (je ne le fais pas avec mes étudiants pour conserver la distance nécessaire). 

Une chose est sure: je sécuriserai son compte. Je lui ferai un cours de communication sociale adapté à son âge. 

Pour conclure, tout cela m'amène à m’interroger sur notre mission de prévention en qualité de spécialistes du web et des médias sociaux. Le projet que j’ai proposé tout récemment à un élu local concerne en effet la prévention chez les Collégiens ou comment apprendre à se servir de Facebook et à gérer son image. Devrais-je un jour proposer un projet de prévention aux enfants des écoles primaires?

Devrais je un jour envisager de faire un profil spécialement consacré aux 3/ 13 ans pour mes cours? Puis, ensuite un profil consacré au 13/103 ans?